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Archos, un scandale français

Henri Crohas n’est pas ce génie charismatique et médiatique de l’informatique grand public et du marketing qu’était feu Steve Jobs – qui mérite l’hommage unanime et mondial qui lui est fait après sa disparition – mais son coup de gueule, dont la presse française unanime s’est faite l’écho, fait mouche. Nous le partageons.

Le fondateur et dirigeant d’Archos, rare concepteur et fabriquant français encore présent sur le marché des produits électroniques grands publics –certes sur un segment haut de gamme-, partage avec le cofondateur d’Apple au moins deux caractéristiques : c’est un innovateur et c’est un entrepreneur. Surtout, malgré sa petite taille, sa société est un acteur reconnu dans le monde entier pour ses innovations dans le domaine des tablettes.

Pourquoi le ministère de l’Education nationale et son ministre Laurent Wauquiez, pourquoi Orange –opérateur issu de l’ancien monopole public français France Télécom financé par l’Etat, donc le contribuable-  ne l’ont-il pas associé à la campagne lancée le 30 septembre sur les tablettes à un euro pour les étudiants, et dont les partenaires sont l’Américain Apple et le Sud Coréen Samsung ?

La réponse du ministre à l’AFP : « quand, cet été, on a préparé notre offre étudiante, le système d’Archos, qui venait d’implanter Androïd, n’était pas totalement stable, cela nous aurait obligé à repousser et à ne pas être prêts pour la rentrée » (source, Le Monde.fr). Elle laisse rêveur.

Aurait-il fallu laisser quelques semaines, quelques mois de plus à cette PME de 100 salariés, qui est tout de même capable de conclure des accords de partenariat avec des géants comme Vodaphone pour mettre à la disposition des consommateurs allemands une offre de tablettes Archos 3 G ? (source : communiqué de presse d’Archos du 30 septembre).

Oui, il aurait fallu. Surtout lorsqu’on fait partie d’un gouvernement qui a décidé de prendre ouvertement pour modèle économique l’Allemagne et son tissu d’entreprises industrielles et familiales – le fameux Mittelstand- et qui martèle qu’il faut développer le tissu des entreprises intermédiaires (ETI) en soutenant la croissance des PME. En Allemagne – sans parler des Etats-Unis-, Archos aurait sans nul doute eu cette chance. Un coup de pouce de l’Etat, très médiatisé à quelques mois de la présidentielle de 2012, qui permet à Apple et à Samsung de s’offrir à bon compte une campagne de marketing auprès des étudiants, futurs consommateurs de leurs produits –et sans doute électeurs-, campagne dont ils n’ont pas besoin tant leur notoriété et leur puissance sont déjà établies. Il faut aider Archos et une belle occasion vient d’être gâchée. C’est un scandale qui vaut bien un coup de gueule !

Christine Gilguy

 

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La « Com » sur le commerce extérieur ne fait plus recette

26 août 2011 2 commentaires

Une fois n’est pas coutume, la publication en août des résultats semestriels du commerce extérieur français est pratiquement passée inaperçue, ne donnant pas lieu au traditionnel point presse de la mi-août du secrétaire d’Etat au Commerce extérieur. Ni même à un communiqué du ministère, qui commente traditionnellement le dossier statistique des douanes.

Il est vrai que les chiffres sont toujours aussi mauvais, avec un déficit qui ne cesse de se creuser : -37,4 milliards d’euros au premier semestre 2011, après – 27, 6 milliards au semestre précédent. Et une progression des exportations (+ 2,8 % par rapport au semestre précédent) trois fois moindre que celle des importations (+ 6,7 %).

Est-ce une raison pour ne plus les commenter ? Sans doute, en rajouter dans le pessimisme ambiant, en pleine crise de la dette et alors que le ralentissement économique aux Etats-Unis et en Europe plombe le moral du business mondial, eût été de mauvais goût à la veille de l’annonce d’une nouvelle cure d’austérité concernant les Français. La « Com » sur le commerce extérieur ne fait plus recette.

Reste que ce creusement du déficit commercial a un côté rageant. Il montre pour le moins qu’au-delà des effets d’annonce, qui ont été nombreux ces derniers mois, toutes les initiatives mises en œuvre depuis bientôt six ans, pour rendre les aides à l’exportation plus efficaces et accroître le nombre de PME exportatrices, par Pierre Lellouche et ses prédécesseurs, tardent à produire des effets significatifs et positifs sur les tendances des exportations, voire sur le nombre d’exportateurs lui-même, qui s’érode. Pour l’heure, la France continue à importer plus de produits qu’elle n’en exporte, et ses structures économiques sont encore loin de savoir utiliser le commerce extérieur comme un levier de croissance.

Christine Gilguy

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Protectionnisme au pays de l’Oncle Sam

Au pays de l’Oncle Sam où le discours libéral est de mise, c’est bien le protectionnisme qui l’a emporté pour le fabuleux contrat de renouvellement de la flotte des avions ravitailleurs du Pentagone (35 milliards de dollars pour une première tranche de 179 appareils).

Le 24 février au soir, le constructeur aéronautique américain Boeing a été délibérément choisi par l’armée américaine au détriment du champion européen EADS. C’est l’épilogue d’une bataille de dix ans où finalement les Etats-Unis ont – comme tous les autres Etats du monde – appliqué la règle de la préférence nationale. Le dernier appel d’offres a été clairement calibré pour avantager l’offre la moins chère : celle du B767 modifié de Boeing. Le critère du prix a effacé tous les autres critères, et plus particulièrement ceux où l’A330 d’EADS est nettement le plus performant.

Dans cette bataille où les enjeux sont énormes (des milliers d’emplois à la clé et le fait de pouvoir faire travailler des centaines de sous-traitants), les dés étaient pipés dès le départ. Certes, le contrat, attribué dans un premier temps en 2000 à Boeing, avait été cassé pour corruption, puis, avait été remporté en février 2008 par EADS après un nouvel appel d’offres. Mais quatre mois plus tard, saisie d’un recours par Boeing, la Cour des comptes invalide la procédure pour vice de forme.

Alors en campagne électorale, le candidat Barack Obama, sénateur de l’Illinois, l’Etat où Boeing a son siège à Chicago, plaide pour un nouvel appel d’offres. Ce sera chose faite : celui-ci est bâti sur mesure pour Boeing. On est très loin de la libre concurrence. Pour les autorités américaines comme pour Boeing il n’était pas question de laisser s’implanter industriellement aux Etats-Unis un concurrent européen et lui permettre de produire en zone dollar pour se couvrir des fluctuations du billet vert. Grâce au protectionnisme américain, Boeing a sauvé la mise et assuré son avenir.

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De la Chine techno

18 novembre 2010 Laisser un commentaire

Il y a encore des gens qui croient que la Chine n’est qu’une grosse usine à fabriquer des jouets pour les enfants de l’occident, des lunettes à bas prix, du prêt à porter ou du matériel de sport.

Je conseillerai à ceux-là de s’intéresser à deux annonces quasi simultanées qui augurent assez bien de la vraie évolution du champion mondial de la croissance.

Les Chinois possèdent désormais le calculateur le plus puissant de la planète : 2,57 petaflops (1 milliard de millions d’opérations à la seconde) pour le Tianhe 1A qui va faire du centre de calcul de haute performance de Tianjïn, une redoutable machine de guerre au service de l’excellence chinoise. Ce premier de la classe est accompagné de 46 autres supercalculateurs qui ne peuvent encore lutter contre les puissances installées américaines (275 machines) et européennes (124) mais patience.

L’autre nouvelle est le lancement d’un court courrier de la nouvelle génération le C 919 qui sera un sérieux concurrent pour les best-sellers d’Airbus et de Boeing (l’A 319 et le B 737). La particularité de cet avion est d’avoir réuni le meilleur de la sous-traitance mondiale pour sa mise en œuvre : les meilleurs américains, les meilleurs français (zodiac, Thalès). Ses réacteurs sont d’ailleurs des Leap X produits par CFM international de la co-entreprise franco américaine Safran-Général Electric.

Le C 919 n’est pas destiné qu’au marché chinois, il concurrencera les deux géants occidentaux sur ce qui était encore leur précarré il y a quelques années. Certes cette percée n’est pour le moment que symbolique, la montée en régime de cet avion sera sans doute plus lente que la seule croissance de la demande intérieure chinoise, ce qui laisse notamment de belles perspectives à Airbus déjà fournisseur de 43 % de la flotte chinoise.

Mais convenez qu’on est déjà bien loin des jouets et du prêt à porter.

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Etat-Unis/Chine : le lapin et la carpe

Ce jeudi 4 novembre, le président américain Barrack Obama se réjouit tout juste d’avoir sauvé les meubles lors des élections de mi-mandat, en perdant sa majorité à la Chambre des Représentants en la conservant au Sénat. Cela présage d’un acteur américain plutôt affaibli sur la scène internationale durant ces deux prochaines années. Comme sa monnaie…

Pendant ce temps, le président chinois Hu Jintao, muni du compte en devises le plus pourvu de la planète, atterrit à Paris où il est reçu en grandes pompes par le président Sarkozy, pour sceller définitivement la réconciliation. Comme c’est désormais la tradition lorsqu’un officiel chinois de haut niveau se rend en Europe, l’événement est accompagné de la signature de nombreuses commandes chinoises, une marque de fabrique de la diplomatie de Pékin : Airbus, Areva, Alstom, Alcatel-Lucent…Personne ne sera oublié. Et, espère-t-on à l’Elysée, par un engagement de Pékin à soutenir les initiatives de la France lors de sa présidence du G20, notamment sur la question du rééquilibrage des taux de change des monnaies dont la monnaie chinoise est une des clés…

Etonnant contraste entre une toujours première puissance mondiale qui semble tâtonner pour se relancer, et une future 1ère puissance mondiale, de plus en plus sûre d’elle-même. Une seule certitude : cela ne présage rien de bon pour ceux qui, notamment en Europe, espère une accalmie du côté des taux de changes. La dévaluation du dollar semble être l’ultime arme utilisée pour relancer l’économie américaine, en témoigne l’annonce de la Fed, la banque centrale américaine, selon laquelle elle va racheter pour 600 milliards de dollars de dette publique américaine… Et l’on ne voit pas très bien ce qui pourrait faire céder Pékin, avec qui le monde entier, à quelques exceptions prêts, veut être allié, sur la question de la réévaluation du yuan.

 

 

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Bienvenue sur la planète des singes !

Qui vient de comparer la gestion de la dette publique américaine à une gigantesque fraude à la Ponzi ou à la Madoff ? Un investisseur américain de poids, Bill Gross, patron du fonds d’investissement Pimco. Il écrit en substance, dans son bulletin mensuel, que les Etats-Unis, s’appuyant sur leur puissante Banque centrale, la FED, remboursent leur dette au reste du monde avec les nouveaux prêts contractés et qu’en lançant elle-même récemment un vaste programme de rachat de titres de cette dette, s’instituant ainsi dernier recours en cas de panique, la FED est même allée plus loin que les illustres escrocs précités. « Je vous le demande : y a-t-il jamais eu de chaîne de Ponzi plus éhontée ? Non, jamais ».

Il n’a pas tort, car au fond, la FED a démontré qu’elle faisait marcher la planche à billets sans aucune hésitation, entraînant une érosion incessante du dollar, et que c’est avec de la monnaie de singe que les Etats-Unis payent.

Dans ce contexte, les déclarations de bonnes intentions des puissances du G20 le week-end dernier pour endiguer la baisse de la devise américaine et éviter une guerre généralisée des monnaies laissent sceptique : pourquoi les Chinois accepteraient-ils de faire un ménage monétaire d’ampleur face aux pressions d’un pays qui ne se donne même pas la peine de ramasser les peaux de bananes qu’il sème sur les chemins de la croissance mondiale ?

Et bien sûr, en attendant, c’est l’Euro, et la compétitivité européenne, qui trinquent. Certes, le taux de change ne fait pas tout, mais il peut grandement aider en période de crise ! Sur la planète finance, les singes sont rois.

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Marseille port de plaisance

Peut-on m’expliquer comment la CGT fait pour soutenir 36 grutiers, travailleurs nantis (4000 euros mensuels pour 18h par semaine) dont la grève va provoquer la suppression de centaines d’emplois dans une région déjà durement touchée par le chômage.

Par la faute de ces camarades de luxe, Marseille gloire déchue de notre marine marchande, ne sera bientôt plus qu’un port de plaisance, une escale à touristes.

Déjà aujourd’hui, si vous êtes dans la Vallée du Rhône, voire à quelques encablures de Notre Dame de la Garde et que vous  faites  le commerce du frais, il vous faut passer par Barcelone ou par Gênes pour être sûr de vos départs et de vos approvisionnements.

Des voix de plus en plus nombreuses s’élèvent dans la cité phocéenne pour dénoncer ce complot contre la raison. Le patronat régional, mais pas seulement lui puisque le Parti Socialiste local s’est joint au mouvement, tente d’ouvrir les yeux des responsables de ce terrible gâchis. Sans grand succès pour le moment.

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Ils vont finir par couler les ports français

30 septembre 2010 Laisser un commentaire

Pas commode de gagner un 100 mètres lorsqu’on court à cloche-pied. C’est pourtant ce que vivent aujourd’hui, avec la énième grève des dockers, les acteurs du commerce international français.

Ces grèves sont si fréquentes  qu’on ne songe même plus à en demander la cause. (En l’occurrence des problèmes de retraite anticipée et de mise en œuvre de la réforme portuaire.) Mais leurs conséquences n’en finissent plus de pénaliser l’économie française, écartant les routes maritimes des escales de notre pays, faisant rétrograder, année après année, les ports nationaux dans tous les classements de la logistique mondiale. Au point même que certaines entreprises du sud de la France envoient leurs marchandises par Anvers et Rotterdam pour ne plus avoir à les confier à la versatilité des dockers de Marseille.

La CGT a été un renfort historique puissant dans plusieurs secteurs industriels de la France moderne. Le nucléaire français n’occuperait pas la place qu’il a aujourd’hui dans le concert mondial si le premier syndicat de France n’avait pas mis tout son poids dans les choix énergétiques du programme nucléaire national, idem pour le choix du turbotrain (ancêtre du TGV) face à l’aérotrain. Ces attitudes responsables rendent encore plus incompréhensibles ce comportement objectif de naufrageur des ports français.

Une attitude qui ne date pas d’hier. Comme en témoigne cette manchette historique et comique de « l’Humanité » de l’immédiate après guerre, citée dans les livres de journalisme :

« Devant les grues immobiles, les dockers refusent toujours de décharger ».

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L’argent facile, selon Marco Polo 2010

6 septembre 2010 Laisser un commentaire

4000 milliards de dollars : c’est ce qui, selon la Banque des règlements internationaux (BRI), est négocié chaque jour sur le marché mondial des changes, notamment dans le cadre des transactions des fonds spéculatifs, sociétés d’assurance et d’autres institutions financières non bancaires…

20 000 milliards de dollars, c’est le montant, en valeur, des transactions liées aux achats de marchandises et de services marchands dans le monde (OMC, 2008) pour une… année. Soit environ 55 milliards par jour.
Autrement dit, la circulation d’argent liée à la spéculation financière est, aujourd’hui, environ 73 fois supérieure à ce qu’il est nécessaire pour régler les seuls échanges de biens et de services…

Pour comprendre ce qui ne tourne pas rond dans l’économie mondiale, cet éclairage est, pour le coup, lumineux ! Il a toujours fallu un peu de spéculation pour accompagner le commerce international, ne serait-ce que pour les besoins de couvertures utiles aux entreprises (approvisionnements en matières premières, protection contre le risque de change ou de taux …).

Mais pour le reste, la finance tourne en grande partie sur et pour elle-même. Rien n’a changé depuis la crise de 2008. A ce rythme, le nouveau grand crash financier que certains craignent n’est pas seulement prévisible : il est certain.

Marco Polo 2010

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Les deux France

1 septembre 2010 Laisser un commentaire

Deux informations le même jour, l’une pour nous casser le moral, l’autre pour nous le remonter.

D’un côté le nouvel Observatoire du « fabriqué en France » (voir l’étude à télécharger ci-dessous), nous raconte, filière par filière, le recul du « made in France » dans la composition des produits consommés dans l’Hexagone : la part française des produits fabriqués en France a ainsi reculé de 75 % à 69 % en 10 ans (1999-2009) *.

De l’autre SEB, leader mondial français du petit électroménager, nous annonce la construction d’une cinquième usine en Chine, en même temps qu’une spectaculaire croissance de ses ventes liée à ses performances sur les marchés émergents. Ceux-là même dont on nous dit qu’ils sont de moins en moins accessibles au « made in France ». Et pourtant SEB vend des produits « chinois » aux Chinois (notamment un extracteur de lait de soja que la contrefaçon n’a pas encore eu le temps de rattraper).

La firme de Côte d’Or qui excelle aussi au Brésil avec ses ventilateurs démontables, a partout une idée d’avance sur ses concurrents, des idées dont la plupart ont vu le jour dans les centres de recherche et les usines du groupe. En France.

SEB aujourd’hui est l’une des meilleures preuves que le French genius a encore de beaux jours devant lui. Qu’il soit « made in France » ou « world made », c’est lui qui fera demain vivre et gagner notre économie. Mieux, le succès de SEB, même s’il est celui d’un grand groupe, parle d’abord à nos PME.

Marco Polo 2010

* L’étude indique aussi que notre industrie devient globalement importatrice nette (99 % du marché intérieur contre 104 % dix ans auparavant), tirée vers le bas par l’automobile qui ne satisfait plus que 92 % du marché intérieur (112 % en 1999), à quelques exceptions près comme l’aéronautique, le ferroviaire, la construction navale, les industries de la santé et l’agroalimentaire. Ces dernières filières sont exportatrices nettes : elles exportent plus qu’elles n’importent !

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